Un débat qui rend service
Le témoignage d'un éducateur enthousiaste
Bonjour à tous
J’ai commis une erreur conceptuelle dans ma formulation ( Un débat qui rend service - Refuser de ne pas comprendre : tomber dans l'eau... ), donc merci Raymond d’avoir replacé le contexte et d’avoir fait un rappel sur la physique. Je vais revenir dans un instant sur mon affirmation « dans l’eau on ne peut pas tomber » et je vais mieux exprimer (du moins j’essaierai !) ce que je voulais dire.
Mais tout d’abord il faut que je clarifie ma position : je ne suis pas ici en guise de défenseur d’une thèse, en l’occurrence je ne viens pas soutenir l’idée que les jambes sont propulsives ou autre. C’est pour cette raison que la question que tu me poses à la fin ne me semble pas pertinente avec le sujet que je souhaite aborder, qui plus est elle risque de faire basculer le débat sur un argument déjà traité ( Deux moteurs? ) et que ne m’intéresse pas dans ce contexte spécifique. Je me limiterai à te répondre que, à ma connaissance, l’être humain n’a pas le moyen de produire une propulsion continue dans aucun de ses actes moteurs. Mais je souhaite que l’on revienne à ma vraie question.
Comme promis, « dans l’eau on ne peut pas tomber ». Immergés ou en position horizontale en surface, on n’est pas en mesure d’expérimenter la chute de la même façon que sur terre, puisque les organes de perception de l’équilibre présents dans l’oreille interne (vestibule et canaux semi-circulaires) ne sont pas soumis au même degré de sollicitation, et ce en raison de la présence de la poussée d’Archimède. Autrement dit, ce que l’on pourrait appeler un substrat de soutien à la locomotion (le sol sur terre, l’eau lorsque nous sommes immergés) est, dans le cas de l’eau, en contact avec une plus grande surface de notre corps, voire avec la totalité (immersion). Dans cette situation, le nageur se retrouve à pousser des masses d’eau en sens opposé à celui de son avancement et cela lui permet d’avancer en passant à travers l’eau. L’homme qui marche, lui, contracte (réalise) une chute à chaque pas qu’il fait, sans qu’aucune force extérieure puisse l’aider dans cette démarche. Il s’agit bien de deux situations de locomotion différentes, avec une exposition à la pesanteur assez différente et, par conséquent, une stimulation des organes de l’oreille interne qui n’est pas la même : dans la marche, un déréglage des actions motrices peut exposer la tête à une chute de hauteur, risque que le cervelet prévient en raison de la perception d’une accélération brutale. Dans l’eau, un déréglage des actions motrices n’expose pas la tête à un tel risque dans l’immédiat. Ce cadre me pose problème lorsque je pense à un concept tel l’équilibration en situation de locomotion aquatique.
En référence au DVD « Une approche de la natation », je l’ai et je l’ai regardé, mais cela ne m’apporte pas une réponse satisfaisante. Dans le film, tu parles de l’analyse image par image que t’as effectué au sein de la FFN (minute 28 :30) et d’un phénomène que tu ’avais observé chez un nageur de dos, en l’occurrence une petite vague qui se formait avec une certaine régularité derrière lui. Cette vague était générée par les battements du nageur, pourtant elle n’était pas présente à chaque battement. C’est au moment où tu as remarqué que cette vague était provoquée par « un abaissement brutal » de la jambe et cela en correspondance du dégagement du bras de l’eau, que tu as pu émettre ton hypothèse : le nageur prend appui sur l’eau avec sa jambe pour pouvoir dégager son membre supérieur de l’eau, donc il est en situation d’équilibration et non de propulsion.
Tu as observé un comportement moteur et tu lui as attribué une fonction, hypothétique à ce stade là. Comment vérifier cette hypothèse ? Quelle est la mécanique de cette fonction ? Par quel lien anatomique et biomécanique un membre inférieur en appui sur une masse d’eau favorise le dégagement de l’eau d’un membre supérieur ? Dans cette partie du DVD tu n’en dis pas plus.
Ensuite, dans l’insert dédié au modèle théorique du nageur, tu reviens sur la notion d’équilibre, en lui substituant le mot orientation. L’orientation référée à 1) Orientation du corps sur la trajectoire et 2) Orientation de la trajectoire.
Je n’arrive pas à lier les deux éléments. Pourquoi l’on passe d’une prise d’appui du corps sur une masse d’eau afin de permettre un dégagement, à l’orientation sur une trajectoire et au maintien de cette trajectoire ? Pourquoi sont-elles regroupées sous la même fonction (équilibration) ? Et, encore une fois, quelle est la mécanique de cette fonction ? Dans le DVD tu n’en parles pas.
Minute 37 :50 , tu parles de l’être humain qui, confronté au milieu aquatique, ne peut plus avoir sa propulsion assurée par les jambes. La fonction propulsive sera assurée par les bras, qui étaient équilibratrices sur terre dans la marche, et, par conséquent, les jambes assumeront un rôle d’équilibration. Inversion des rôles. Mains comment vérifier que ce modèle s’applique à ce qui effectivement se passe en situation de locomotion aquatique ? Ici deux choses m’interpellent : d’un coté, la présence de la poussée Archimède, force significative qui s’oppose à la pesanteur dans l’eau, puis le fait que sur terre les membres que l’on considère équilibrateurs (les bras) ne sont pas en contact avec le substrat de soutien à la locomotion, dans l’eau les membres équilibrateurs (les jambes) sont entièrement en contact avec ce substrat. Sont-il des éléments négligeables dans l’élaboration d’un modèle de locomotion humaine aquatique ?
Minute 56 :30 . A propos du développement du papillon, tu dis que les jambes deviennent équilibratrices et ne sont plus propulsives (battement dauphin à la place des jambes de brasse), donc le propulseur (les bras) est en avant, le stabilisateur (les jambes) est en arrière. Stabilisateur ? Un troisième élément qui est regroupé sous la fonction d’équilibration (avec prise d’appui pour dégagement et orientation)? Qu’est-ce qu’est stabilisé par les jambes et que se passerait-il en absence de leur action ?
Minute 1 :03 :40 . La fausse recette des jambes pour une augmentation significative de la propulsion et le stage avec Franck Esposito. Par mes observations récentes, dans l’eau en tant que nageur et sur le bord en tant qu’éducateur, je ne peux qu’être d’accord sur ce qui est exposé dans cette partie du DVD : considérer les membres inférieurs en tant qu’élément locomoteur prépondérant et organiser la motricité aquatique en fonction d’eux mène à des solutions décidément non optimales et désorganise l’action des propulseurs principales.
La mécanique de l’équilibration, quant à elle, m’est toujours obscure. Je voudrais bien que tu m’éclaires là-dessus et que l’on puisse avoir un échange sur ce sujet. Je t’en remercie d’avance.
Giuseppe